Grand espoir du football français révélé à l’AS Monaco et actuel sociétaire du FC Valence, Geoffrey Kondobgia (25 ans) a décidé de renforcer les rangs de la République Centrafricaine alors qu’un retour en Équipe de France après trois ans d’absence était dans les plans. Interrogé par RFI le milieu de terrain a expliqué les raisons de son choix qui honore l’Afrique et le pays de ses parents.
“Une grosse fierté ! Mais surtout, surtout, beaucoup d’émotions ! Depuis que je suis arrivé ce matin à Bangui, beaucoup d’images défilent dans ma tête. […] Il y a un peu tout et n’importe quoi dans mon esprit : la première fois où je suis venu ici, les endroits où mes parents ont grandi… Je pense aussi à ma grand-mère qui est décédée il y a peu de temps” a expliqué Geoffrey Kondogbia avant de disputer son premier match avec les Fauves face à la Côte d’Ivoire pour éliminatoires de la CAN 2019 (défaite 4-0).
“Mon rêve, c’était la Centrafrique mais pas celui de mes proches”
Interrogé sur son choix étonnant d’abandonner l’idée de retrouver l’Équipe de France alors qu’il revient à son meilleur niveau, l’ancien joueur de l’AS Monaco a expliqué sa motivation. “C’est vrai que je n’en ai jamais parlé. Ce que les gens ne savent pas, c’est que j’ai toujours voulu jouer pour la République centrafricaine. Mon rêve, c’était de jouer pour la Centrafrique. Ce qui n’était pas le cas de mes proches, de mes amis et de membres de ma famille. Ils n’étaient pas d’accord. Je pense que c’était par rapport à ma carrière et à ce que l’équipe de France pouvait apporter. J’ai fait abstraction de mon souhait. J’ai essayé de jouer le jeu en me disant que ‘oui, c’est un plus au niveau de la carrière footballistique'”.
“Depuis tout petit j’ai pensé que mon aide serait plus profitable à la Centrafrique qu’à la France”
Sélectionné 5 fois avec les Bleus en matchs amicaux, le sociétaire du FC Valence a murement réfléchi avant de changer de nationalité sportive à seulement 25 ans. “Mais, moi, j’ai toujours voulu jouer pour la République centrafricaine. Ce qui m’a, on va dire, « sauvé », c’est la déception de mes proches. Ceux qui étaient contre ma venue en équipe de RCA ont vu que je n’étais plus appelé en équipe de France. Ils m’ont, entre guillemets, laissé partir. Voilà la raison générale. Mais je veux préciser que ça n’a rien à voir avec ce que je ressens. Je me sens Français et Centrafricain. J’ai juste pensé dès mon plus jeune âge que mon aide serait plus profitable à la République centrafricaine qu’à la France. C’est comme dans une famille. Quand tu as deux frères, si l’un d’entre eux a besoin d’aide, tu te tournes davantage vers lui“.
“La guerre civile m’a encouragé à venir. De l’espoir et du courage, c’est ce dont on a besoin”
Malgré la désorganisation qui caractérise les Fédérations africaines, le solide milieu de terrain (1m88) n’est nullement effrayé par la pression qui existe en Afrique et explique son envie d’aider à l’amélioration des choses. “On a tous ce genre de pression, que ce soit au boulot ou au sein d’une famille. Ça fait partie de la vie. Je vais essayer de me donner au maximum. Je ne promets rien. J’essaie d’apporter mon expérience et mon savoir-faire au niveau du football. Ma mission est simplement d’apporter un plus. (…) Mais il y a aujourd’hui une nette amélioration en équipe nationale, que ce soit au niveau de l’organisation et des joueurs. Ça donne de l’espoir et du courage. C’est ce dont on a besoin” avant d’évoquer le sujet de la guerre civile qui aurait pu le dissuader de rejoindre la République centrafricaine. “Bien au contraire. Justement, ça m’a encouragé. Je pense que ce genre de situation permet d’être plus soudés entre Centrafricains. Ça donne encore plus envie d’aider la RCA“.
“Je n’ai aucune notion politique. Moi, je fais du sport. Ce qu’on veut c’est aider.”
“Le pays a connu pas mal de tristesse et de difficultés, ces dernières années. Mais je ne viens que deux fois par an et je n’ai aucune notion politique. Moi, je fais du sport. J’ai toutefois l’impression que les choses se calment petit à petit et qu’il y a de l’amélioration. Ça amène de l’espoir à tous les Centrafricains” avant de poursuivre sur le côté humanitaire de son choix. “Dès que j’ai eu un fils, j’ai réalisé l’importance d’aider les enfants. Donc, on a créé cette association avec des membres de ma famille. La première chose qu’on essaie de faire, c’est de restructurer des écoles. On l’a ailleurs fait avec une première école, il y a quelques jours. On a fourni toutes les fournitures scolaires pour les élèves. On a fait construire des salles, des bancs, des tableaux, des sanitaires. Tout ça pour que les enfants puissent étudier dans de bonnes conditions. Voilà ce qu’on essaie de faire, petit à petit. Et pourquoi ne pas développer nos activités dans d’autres choses ? Nous, ce qu’on veut, c’est aider” a conclu Kondogbia qu’il faut désormais considérer comme une nouvelle star du football africain.
Yassine Benarbia, La Gazette du Fennec
Propos recueillis par la correspondante de RFI à Bangui