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L’Algérie de Zetchi, un poids-plume à la CAF ?

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Le dernier symposium organisé à Rabat aura été riche en enseignements pour l’avenir du football africain en général et algérien en particulier. Les principales conclusions étant connues à savoir une organisation de la phase finale de la CAN dès 2019 en été et à 24 au lieu de 16. Mais pour le football algérien, il aura été la manifestation éclatante d’une FAF sans influence parce qu’en panne de stratégie face à une fédération royale marocaine qui a fait intelligemment main basse sur la nouvelle CAF.

Le Maroc et Fouzi Lekjaa réussissent leur OPA sur la CAF

Inconnu au bataillon en 2015, le discret Fouzi Lekjaa est aujourd’hui sous le feu des projecteurs. Mielleux au départ avec les puissants Hayatou, l’Égyptien Abou Ridha et Raouraoua, avec lesquels il s’attablait volontiers, le Président de la Fédération marocaine de football a excellé dans les coups bas en coulisses. D’abord, il a eu le mérite de remettre en selle une Fédération anéantie par des sanctions exagérées prononcées contre elle suite au désistement du Maroc pour l’organisation de sa CAN en 2015. C’est son droit et cela est justifié. Cette première bataille remportée, il a été l’exécutant d’une stratégie diplomatique brillante définie par le Palais à savoir conquérir le continent africain sur tous les fronts. Économique d’abord, culturel, politique et sportif ensuite.

Très tôt, le royaume chérifien par le biais de ses Ministères de la Jeunesse et des Sports et des Affaires étrangères a commencé un intense lobbying en Afrique. Fouzi Lekjaa, plus instrument que stratège, aura été l’exécutant actif sur le front footballistique. Ainsi plus d’une trentaine de partenariats ont été signés avec comme monnaie d’échange le vote au comité exécutif de la CAF. En mars dernier, le patron du football marocain se trouve donc devant un boulevard déblayé par des responsables stratèges et patriotes, surtout lorsque l’adversaire a pour nom Algérie et qu’il est fragilisé par un Ministre autoritaire et inconsistant.

Une FAF fragilisée par les siens

Sans revenir sur la genèse des événements qui conduisent aujourd’hui au constat d’une FAF insignifiante à Rabat, il importe de situer les responsabilités de chacun afin d’amorcer le redressement du football algérien. Disons-le tout de suite, la période de turbulences qu’a connue le football algérien suite à l’élimination des Fennecs au 1er tour de la CAN 2017 au Gabon a fait beaucoup de mal au football national. Les responsabilités sont partagées et l’ancien locataire en la personne du puissant Mohamed Raouraoua a commis nombre d’erreurs. N’ayant d’abord pas misé sur le bon cheval à la 39ème AG de la CAF, il n’a paradoxalement pas su concrétiser la grande influence qui était la sienne pendant les années fastes. A sa décharge, il n’a pas véritablement été aidé par les autorités politiques et sportives nationales. L’Algérie qui est incontestablement une puissance politique africaine et arabe néglige néanmoins la diplomatie économique, culturelle et sportive. Ainsi, l’ancien président de la FAF naviguait à vue, sans même pouvoir faire campagne. Il ne pouvait raisonnablement lutter face aux moyens colossaux déployés par un Roi Mohammed 6 déterminé à remettre son pays à la CAF et éliminer tout symbole algérien d’influence. Pire, Raouraoua faisait face à un front interne encore plus féroce symbolisé par un Ministre de la Jeunesse et des Sports maladroit et entêté à le faire tomber alors qu’il aurait été judicieux de soutenir Raouraoua sur le plan continental avant de s’engager dans un processus de renouvellement à l’interne. L’Algérie aurait ainsi fait d’une pierre deux coups. Mais c’est peut-être trop en demander à un Ministre clivant dont le leitmotiv quotidien est de couper des têtes sans vision stratégique derrière. Monsieur El Hadi Ould Ali, visiblement content de sa qualité de Ministre d’État, aura donc eu la peau d’El Hadj et placé ses hommes. Avec un autoritarisme rare, il a aura aussi fragilisé la place de l’Algérie dans les instances du football continental.

Un grand travail attend la FAF de Zetchi

Dès lors, même si le patron actuel de Dely Brahim affirme à qui veut l’entendre qu’il est légitime parce que démocratiquement élu, il faut bien constater qu’il a été « mal » élu parce qu’intronisé seul face au néant. La personne de Monsieur Zetchi n’est évidemment pas remise en cause. Seulement, il en va en sport comme en politique, lorsqu’on est élu face à personne, sans débat, sans mettre dans la balance la pertinence de tel ou tel projet, alors on se heurte inévitablement à un déficit de légitimité démocratique. A l’heure actuelle, personne n’est en mesure de dire combien coûteront les 4 centres de formation promis, dans quelles assiettes seront-ils construits, dans combien de temps et par qui seront-ils gérés ? Ainsi, un Président contesté à l’interne ne peut triompher sur le plan continental.

De même, l’élection au forcing de Zetchi aurait pu être dépassée si toute la famille footballistique se reconnaissait autour de la composante du bureau actuel. Hélas, ce n’est pas le cas. Tantôt accusé d’affairisme, tantôt taxé de favoritisme envers la région Centre, certains présidents comme ceux de l’ES Sétif, de la JSM Skikda et dernièrement Zerouati de la JS Saoura ou Medouar de l’ASO Chlef dénoncent la partialité d’une FAF qui serait plus Algéroise qu’Algérienne. La méthode ne fonctionne visiblement pas. Il est donc urgent d’en changer. La légitimité contrairement à ce qui a été martelé maladroitement par le patron de la FAF ne se décrète pas en conférence de presse. Elle s’acquiert par une stratégie claire, par la mobilisation des compétences, par la capacité à fédérer en ne donnant pas le sentiment de favoriser une région ou un club au détriment de l’intérêt national.

La FAF devra placer ses hommes à la CAF

Le plus grand pays d’Afrique ne peut avoir d’autre vocation que d’être dans le premier wagon du football continental. La FAF ne peut se permettre de s’asseoir gentiment pour lever la main et dire : « OUI ». L’Algérie qui inventait dans les années 1970, sous feu Houari Boumediene, le concept de coopération Sud-Sud se fait coiffer au poteau par un voisin plus pragmatique qui a su le matérialiser aujourd’hui. L’Algérie qui agit pour assister diplomatiquement, logistiquement et financièrement en prêtant des sommes colossales et même en effaçant des dettes entières de pays africains se retrouve paradoxalement à la CAF comme un pays quelconque. Que les choses soient claires, Fouzi Lekjaa est le véritable patron de la CAF et il ne fera aucun cadeau à l’Algérie. Ahmad Ahmad, faible faire-valoir se fera aussi coiffer au poteau par le manœuvrier patron du football marocain, c’est une certitude.

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Les dés étant jetés, l’inexpérimenté Zetchi, qui a eu la bonne idée de faire appel à la notoriété africaine d’un Rabah Madjer pour l’épauler dans ses sorties, ne doit pas imiter simplement les partenariats de Lekjaa dont les contours restent assez flous. Ce dernier n’a fait qu’appliquer une feuille de route savamment pensée par des responsables plus pragmatiques et visionnaires que nos coupeurs de tête. Le patron de la FAF, qui demande fort logiquement du temps, ne peut se contenter de quelques selfies pris en compagnie d’Ahmad. L’Algérie est un pays redouté qui doit imposer sa voix. Elle possède d’autres moyens d’influence et des alliés pour inverser aisément la donne. Pour cela il importe de changer radicalement la donne. A commencer par placer des compétences algériennes avérées dans les très nombreuses commissions de la CAF où l’Algérie est anormalement sous-représentée. Il faut aussi et surtout impliquer le Ministère de tutelle et le puissant Ministère des Affaires Étrangères dans le cadre d’une stratégie novatrice, loin des combats de coq. Pour l’heure, le mal est fait et chose impensable il y a 6 mois à peine, une Algérie fragilisée par les siens devra jouer des coudes pour faire entendre une voix timide à la CAF.

Réda Kaboura, La Gazette du Fennec

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