A la veille de la Coupe du Monde 1958 et plus précisément le dimanche 13 avril 1958, neuf joueurs Algériens évoluant dans les plus grands clubs français dont des sélectionnés dans l’équipe de France, font défection et rejoignent Tunis où ils forment l’équipe de football du FLN.
Le communiqué du FLN du 15 avril 1958 souligne l’importance d’une équipe performante sur le plan international pour l’émergence d’une identité nationale algérienne. Il qualifie ses joueurs de patriotes prêts à tout sacrifier pour l’indépendance de leur nation et les présente comme un exemple de courage pour les jeunes algériens.
En réalité, c’est après la Bataille d’Alger en 1957 que les responsables du Front de Libération Nationale décident de bâtir une équipe nationale algérienne de football, afin de promouvoir l’indépendance de l’Algérie dans d’autres pays.
La tâche de sélectionner les joueurs est attribuée à Mohamed Boumezrag, qui est directeur de la sous-division régionale algérienne de la Fédération française de football (FFF). Politiquement, il est chargé par Mohamed Allam, de préparer et de garder secrète cette équipe pendant la phase de planification.
L’un des joueurs de cette célèbre équipe du FLN, à savoir Mohamed Maouche raconte que “L’idée de créer cette équipe avait germé dans l’esprit de Boumezrag à son retour de Moscou (Russie), où il avait pris part aux Jeux de la Jeunesse de 1957. Il m’avait contacté juste après pour m’exposer le projet, et à partir de là, on a commencé à se voir régulièrement, chaque mercredi au café du Luxembourg à Paris, pour tout mettre en place” a ajouté Maouche, qui pourtant ne fera pas partie de la première vague des 9 joueurs qui ont rejoint clandestinement la ville de Tunis ce fameux 13 avril 1958.
La reconnaissance tardive de la FIFA mais pas la CAF
Ainsi, le 7 mai 1958, à la veille du tournoi maghrébin qui allait regrouper la Tunisie, pays organisateur, le Maroc, la Libye et l’équipe du FLN, la FIFA alors dirigée par l’Anglais Arthur Drewry, a condamné les pays cités sous la pression de la FFF. Ces fédérations nationales naissantes ont payé cher le fait de côtoyer cette équipe honnie par l’instance internationale du football : “La Tunisie et le Maroc voient leur demande d’adhésion à la FIFA rejetées parce que la Tunisie accueille les joueurs de l’équipe, et parce que le Maroc a affiché son soutien à la cause de l’indépendance algérienne“, explique l’historien du sport Stanislas Frenkiel.
A ce moment-là, la CAF, existait depuis un peu plus d’une année, puisqu’elle a été créée en février 1957. Elle était alors dirigée par l’Égyptien Abdelaziz Mostafa, à l’époque membre du comité exécutif de la FIFA et qui a voté toutes les résolutions qui condamnaient les fédérations qui acceptaient d’accueillir sur leur sol l’équipe du FLN. Sur le chapitre CAF-équipe du FLN, la première n’a jamais modifié sa position sur ce dossier jusqu’à l’accession de l’Algérie à son indépendance. Plus grave encore, si la FIFA, reconnait par la suite cette équipe du FLN en l’intégrant dans son histoire du football moderne, la CAF n’a jamais montré sa reconnaissance à cette glorieuse équipe du FLN. La dernière preuve est que dans le livre produit par la CAF consacré au demi-siècle de l’existence de la CAF (1957-2007), à l’occasion de la célébration grandiose en 2007 au Soudan et en Éthiopie, deux des quatre pays fondateurs de la CAF avec l’Égypte et l’Afrique du Sud, l’histoire et l’épopée de la glorieuse équipe du FLN ont été dissimulées. Le livre de la CAF ne leur a consacré que trois malheureuses lignes pas plus…
“Le choix du 13 avril 1958”
Pour rassembler les neuf premiers joueurs qui allaient former le noyau de l’équipe du FLN cette date n’a pas été choisie « fortuitement » comme l’explique Mohamed Maouche, car cette date réunissait toutes les conditions nécessaires pour passer à l’acte à l’occasion de la 30ème journée du championnat de France de première division.
“C’était un dimanche et il y avait une journée de championnat, en France. Boumezrag avait remarqué que non seulement les joueurs algériens allaient être confrontés dans duels directs, notamment au Stade Louis II, où il y avait cinq joueurs, entre l’AS Monaco, qui recevait Angers, mais pas seulement, puisque ces matchs se déroulaient dans des villes situées à proximité des frontières italienne et suisse. Autrement dit, une bonne porte de sortie pour quitter la France” a-t-il indiqué.
Depuis cette date du 13 avril, la sélection du FLN a sillonné le monde entier disputant des matchs dans plusieurs pays dont l’Union Soviétique (5 matches), la Yougoslavie (5 matches), la Tchécoslovaquie (8 matches), la Roumanie (7 matches), la Hongrie (6 matches), la Bulgarie (9 matches), la Chine (5 matches), le Vietnam (5 matches), le Maroc (6 matches), la Tunisie (8 matches), la Libye (2 matches), l’Irak (6 matches) et la Jordanie (4 matches).
Si la première vague du 13 mai 1958 a rassemblé neuf joueurs (le dixième de l’AS Monaco Hassen Chabri a été arrêté à la frontière italienne) d’autres vagues de joueurs arriveront progressivement en juillet 1958, juillet 1960 et novembre 1960. Entre 1958 et 1962, l’équipe du FLN avait disputé 91 matchs, 65 victoires, 13 nuls et 13 défaites, 385 buts pour et 127 contre.
Composition de la glorieuse équipe du FLN :
ARIBI-BOUMEZRAG (Entraîneurs) – BOUBEKEUR- ZITOUNI- DEFNOUNE – MEKHLOUFI – OUDJANI – SETATI- CHABRI – IBRIR 1- IBRIR 2- SOUKHANE 1- SOUKHANE 2- BOURICHA- OUALIKENE – AMARA – ROUAI – BEKHLOUFI – BOURTAL – BOUCHACHE 1 – BOUCHACHE 2- KERMALI – BRAHIMI – MAOUCHE – KEROUM – DOUDOU- ZOUBA – BEN TIFOUR – MAZOUZA – HADAD – BOUCHOUK – ELAMRI SELAMI (Infirmier).