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Entretien Exclusif

Taoufik Makhloufi : « Cette médaille d’argent vaut du diamant à mes yeux »

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Son retour au premier plan aura été tonitruant. Sans faire de vagues et égal à lui-même, Taoufik Makhloufi a brillé lors des Mondiaux d’athlétisme (27 septembre au 6 octobre) à Doha (Qatar). L’Algérien s’est paré d’argent au 1500m. Un véritable exploit pour le demi-fondiste après presque 3 années de pépins physique l’ayant condamné à une longue absence. C’est décontracté après avoir troqué sa chasuble verte pour une tenue en jean et les pointes pour des Air Force que le médaillé d’or des Jeux Olympiques de Londres 2012 nous a livré cet entretien à Alger. Une entrevue dans laquelle il nous raconte cette course mémorable et ce qui l’a précédée. Aussi, il évoque la sélection nationale de football et son sentiment lors du sacre, tout aussi sensationnel, des Fennecs à la CAN-2019.

>> L’entretien avec Taoufik Makhloufi en vidéo :

>> L’entretien en version texte :

Taoufik, inévitablement, on commencera par votre exploit et cette belle médaille d’argent décrochée à Doha lors des Mondiaux d’athlétisme. Vous avez pu revenir en force et au bon moment. Que ressentez-vous après avoir réalisé cette belle performance ?

Je suis très content de cette consécration. Cette médaille n’est pas en argent pour moi. Elle vaudrait même du diamant à mes yeux parce que je suis revenu de très loin sachant que j’étais absent depuis les JO 2016 jusqu’à cette année. Ce que j’ai pu accomplir, c’est aussi grâce à mon entraîneur Philippe Dupont. Il m’a soumis à une préparation adéquate m’ayant beaucoup aidé à retrouver le niveau requis et être au rendez-vous à Doha.

On revient sur cette mémorable finale du 1500m. Quelle est la première des choses qui a traversé votre esprit après avoir franchi la ligne d’arrivée ?

La première des choses que je me suis dit est que « rien n’est impossible ». Surtout que, pour moi, l’année 2019 était juste année préparatoire pour les JO 2020. Mais je me suis retrouvé en finale des Mondiaux avec, en prime, un podium et auréolé d’argent. Du coup, cette médaille est précieuse pour moi et je peux la mettre en seconde place après l’or des Olympiades de Londres en 2012.

Sincèrement, compte-tenu de vos chronos établis avant les Mondiaux lors des courses de préparation, espériez-vous finir dans les trois premiers lors de la finale ou vous vous êtes juste dit : « je vais courir et voir comment cela va se passer » ?

J’avais couru en 3:31.77 sur 1500m et 1:45 sur 800m. Ces temps sont ceux d’un potentiel médaillable. Je ne vais pas dire que j’étais persuadé à 100% que j’allais décrocher un podium mais j’avais bon espoir de le faire. Dieu merci, j’ai pu gérer jusqu’à la finale qui s’est soldée avec un résultat positif et cette seconde place.

“Je savais que Cheruiyot allait partir comme une fusée”

Taoufik, vous avez parlé « chronos ». Vos adversaires en finale avaient, eux aussi, de bonnes performances chronométriques à l’instar du Norvégien Ingebrigsten, le Polonais Lewandowski et -surtout- le Kényan Cheruiyot. D’ailleurs, le tempo donné par ce dernier était soutenu. Est-ce que vous aviez la force d’aller chercher Cheruiyot sur son accélération ?

Franchement, je n’avais aucune certitude. Si j’avais tenté de le rattraper, il y avait juste deux éventualités : soit je prends l’or, soit rien. Les exercices et entraînements que j’ai fait lors de ma préparation ne me permettaient pas de défier Cheruiyot sur son point fort. Je n’ai pas eu le temps optimal pour me préparer. Comme j’ai dit, c’était soit je résiste au finish et je passe, soit je me ferais dépasser par les autres coureurs. J’ai choisi de revenir avec une médaille au pays même en bronze. Finalement, elle était en argent et j’ai réalisé ma meilleure performance en 2019 en 3:31.38.

On restera sur les chronos. Lors de la Ligue de Diamant à Paris, vous aviez établi un 3:31.77 terminant 7e de la course. A Doha, vous avez bouclé la distance en 3:31.38 et pris la 2e place. Quels sont les éléments qui ont joué en votre faveur lors de cette course ?

Il faut savoir que plus d’un mois séparait la Ligue de Diamant à Paris et les Mondiaux au Qatar. En cet intervalle temps, tant de choses changent. Il y a eu beaucoup de travail mais aussi l’expérience de mon coach qui m’a permis d’être plus performant et d’afficher le niveau que vous avez pu voir à Doha.

La finale était très rapide (il nous coupe et nous dit « extrêmement rapide » et rigole), n’appréhendiez-vous pas de craquer au finish ?

Avec l’entraîneur on a étudié les autres courses et le comportement des adversaires. Il m’a dit que la finale pourrait être lente mais aussi rapide. Il m’a demandé de rester toujours proche de la tête dans les deux cas de figure. Surtout qu’on savait que Cheruiyot allait partir comme une fusée. Ça a toujours été sa manière de courir.

“Je n’ai pas eu le temps optimal pour me préparer”

Avec du recul, est-ce que Taoufik changerait quelque chose à sa tactique de la finale de Doha ?

Non, je ne changerai rien. Mais si je pouvais revenir en arrière, je me serais bien préparé 3 semaines ou un mois en plus. Je pense que j’aurais pu aller chercher l’or.

Taoufik, lors de la phase de préparation, vous vous étiez aligné sur quatre courses de 800m et une seule sur 1500m. Au final, vous aviez choisi de vous inscrire sur 1500m uniquement. Peut-on savoir par quoi était motivée cette décision ?

A vrai dire, j’avais plus de chances de faire un bon résultat sur 1500m. Pour le 800m, mes chronos n’étaient pas terribles. Si j’avais réalisé dans les 1:43, j’aurais pu concourir sur la distance mais avec 1:45, la probabilité de faire une bonne performance était très faible. J’ai une bonne pointe de vitesse et le 1500m est une course lente. Et comme le finish et la ligne droite nécessitent la vitesse et sont décisifs pour le résultat final, c’était donc la course qui me convenait.

Lors de votre passage en zone mixte après la finale de Doha, un journaliste vous a demandé quelle était votre course favorite. Vous lui avez étrangement répondu que c’était le 800m…

Oui. En effet. Pour moi, c’est plus facile. Le 1500m est une course très éprouvante et exigeante.

“800m ou 1500m ? Pas encore fait un choix définitif pour les JO-2020 de Tokyo”

Si Makhloufi avait eu plus de temps pour se préparer, aurait-il couru 800m, 1500m ou les deux ?

A vrai dire, on aurait pris la décision en concertation moi et mon entraîneur. On aurait étudié les adversaires et évalué quelle course m’offre plus de chances de décrocher une médaille.

Quelques mois nous séparent, 8 plus exactement, des JO-2020 de Tokyo. Est-ce que Makhloufi a choisi sa course pour ce rendez-vous ?

Pour l’instant, on n’a pas tranché définitivement. On va voir comment je me sentirai lors des courses à venir et décidé pour les JO.

Concernant les Olympiades de Tokyo, que promet Makhloufi pour les Algériens ?

La seule chose que je peux promettre c’est de travailler, être patient et faire des sacrifices. Promettre une autre médaille c’est difficile à tenir. Pas impossible mais difficile. Parce que pour gagner une médaille, il faut toujours un peu de chance. C’est vraiment infime mais ça peut être déterminant. J’essaierai d’être à la hauteur des attentes et donner le maximum. On prie juste pour que Dieu nous donne la force et la patience.

On va rester avec le peuple algérien mais sortir un peu de l’athlétisme. On va parler foot. L’EN a gagné la CAN-2019. Quel était votre sentiment ?

Comme tout Algérien, j’étais fier de ce sacre africain. D’ailleurs, rien que tout à l’heure j’ai pris une photo avec le trophée.

Comment aviez-vous vécu la victoire des Verts ?

J’étais extrêmement content. C’était une joie indescriptible. Mon meilleur moment était le but de Mahrez sur coup franc en demi-finale. J’aurais aimé qu’il l’inscrive en finale.

On allait vous demander qui était votre joueur préféré de l’équipe nationale mais on croit que vous venez de réponde à cette question…

Je pense que chaque joueur a apporté sa touche et sa pierre à l’édifice…

“Djamel Belmadi a la mentalité de la gagne”

Donc vous préférez privilégier le groupe et garder l’esprit collectif du football ?  

Voilà. Je pense qu’ensemble ils sont plus forts. Chaque élément a eu son rôle à jouer lors de la CAN. C’est ce qui a fait la différence.

Vous avez une relation particulière avec votre entraîneur Philippe Dupont. Un avis sur le sélectionneur national Djamel Belmadi ?

Belmadi a la mentalité de la gagne. Il pense comme un champion. Très rigoureux et discipliné. Il travaille avec sérieux et abnégation et ça s’est répercuté positivement sur le groupe. Ça se voit aussi dans les résultats. Je lui souhaite beaucoup de réussite pour les prochaines échéances.

Lors du dernier match amical de l’Algérie face à la Colombie joué à Lille (France), vous aviez donné le coup d’envoi de la rencontre. Avez-vous pu parler avec les joueurs et l’entraîneur après le match ?

Oui. Ils m’ont félicité pour ma médaille. Ils étaient aussi fiers à leur tour. Belmadi m’a réitéré ses félicitations et semblait content de ce que j’ai accompli comme citoyen et ambassadeur du sport algérien.

Nous aussi on vous félicite, encore une fois, pour cette belle médaille d’argent en espérant que vous en gagnerez d’autres dans un avenir proche.

Interview réalisée par Mohamed Touileb

>> Bonus vidéo :

Makhloufi donne le coup d’envoi de Colombie-Algérie (0-3) :

>> Lire également l’entretien de son coach Philippe Dupont :

Philippe Dupont : “La force de Taoufik Makhloufi, c’est son mental !”

 

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