Les nombreux scandales qui secouent la maison de Dely Brahim depuis l’élection d’Amara Charaf-Eddine ne surprennent plus personne, ce ne sont en fait que la partie apparente de l’iceberg. Le groupe des 13 « bénévoles » totalement hétéroclite imposé d’en haut avec en son sein quatre ou cinq requins pour composer le BF ne pouvait en aucun cas constituer une force de réflexion, capable de proposer une stratégie de développement pour le football algérien à court, moyen et long terme.
Venu avec un programme ambitieux articulé autour de 11 points, le Président de la FAF n’en a concrétisé aucun. Pire, il a commis 11 bourdes qui risquent de lui coûter cher à l’heure des bilans.
Il a accepté d’être un président inéligible
Avant même l’élection d’Amara Charaf-Eddine, le président de la commission de candidature Abdelmadjid Yahi avait tiré publiquement la sonnette d’alarme en déclarant inéligible le candidat unique pour le poste de président. Ce dernier est dans le milieu du football depuis seulement trois ans alors que l’article 26 alinéa 2 dans son point H des statuts de la FAF traitant des critères d’éligibilité, stipule clairement que le candidat doit « avoir exercé des responsabilités dans des institutions ou associations sportives de football pendant au moins cinq (05) années consécutives ». Ce qui était loin d’être le cas du Président de la FAF et c’est ce qui se répercute aujourd’hui sur sa gestion totalement néophyte des affaires du football. Le pire c’est qu’Amara Charaf-Eddine n’est pas le seul. Hakim Medane qui a eu un mandat de la JSM Béjaïa alors qu’il n’y occupe aucun poste n’était pas non plus éligible. Cette situation de président imposé d’en-haut n’a jamais permis à Amara Charaf-Eddine d’avoir les coudées franches dès son installation.
Des commissions en veux-tu en voilà !
Dès sa prise de fonction au lendemain des passations de consignes avec Kheïreddine Zetchi, le nouveau président de la FAF s’est envolé au Qatar pour assister au tirage au sort de la Coupe arabe et préparer le premier Bureau fédéral au cours duquel, il devait désigner parmi les membres du BF, les présidents des commissions. Le choix des présidents des commissions et la création de commissions fantoches juste pour ne pas fâcher certains collègues ont été faites sans consulter les principaux concernés. Ainsi, Yacine Benhamza et Djilali Touil se sont retrouvés à la tête de la Commission du football professionnel et amateur respectivement en train de marcher sur les plates-bandes des différentes ligues. Bachir Mansouri s’est retrouvé à la tête de la Commission des infrastructures (???!!!) sans comprendre vraiment son rôle. Idem pour Mohamed Maouche qui a donné toute sa vie au développement purement technique du football et qui s’est retrouvé à la tête de la Commission juridique tout comme Mouldi Aïssaoui, ancien ministre qui préside la Commission de la réforme juridique qui est en fait un double de la Commission juridique. Le comble a été la Commission fédérale de l’arbitrage qu’il s’est accaparé sans demander l’avis de personne. Aujourd’hui et mis à part la Commission de coordination des ligues et à un degré moindre la Commission de finances, aucune feuille de route n’est proposée pour les nombreuses autres commissions.
Il a été incapable de résoudre le problème du cumul de fonctions
Depuis février 2021 et le décret ministériel surréaliste du cumul des fonctions, les fédérations y compris la FAF continuent de jouer au chat et à la souris avec les pouvoirs publics. Surréaliste parce qu’il exige à des bénévoles de choisir une seule association alors que le cumul ne concernait que les présidents pour des raisons évidentes de conflit d’intérêt. Qu’à cela ne tienne, un décret exécutif doit être exécuté quoi qu’il en soit, mais les membres du Bureau fédéral, présidents des ligues continuent à défier les pouvoirs publics. En quoi cela a-t-il un lien avec leurs relations avec le président de la FAF ? Ce dernier a maladroitement cherché le conflit avec des membres censés l’assister dans sa tâche en les menaçant dès le deuxième Bureau fédéral de les mettre dehors s’ils ne démissionnent pas. C’était le deuxième couac après le choix des présidents des commissions qui a contraint certains membres du BF à tenir leur première réunion en cachette et sans Amara Charaf-Eddine. Réunion qui a envoyé ce dernier contre les cordes et à perdre du terrain vis-à-vis de ses vice-présidents, leaders de la première mutinerie. Au jour d’aujourd’hui, les seuls membres à avoir fait leur choix sont Mohamed Ghouti qui a préféré retourner à la ligue d’Oum El Bouaghi beaucoup plus par dépit après avoir été dégommé de la CFA, sa remplaçante Fadela Chachoua qui est retourné bredouilles à la Ligue de Boumerdès après un bref passage au Bureau fédéral et Bachir Mansouri qui a choisi le BF au détriment de la ligue d’Illizi. Yacine Benhamza, Ammar Bahloul, Rachid Oukali, Djillali Touil et Naciba Laghouati continuent à tenir le bâton par le milieu.
Il a étouffé un gros scandale
Au milieu de ce tumulte, un gros scandale a atterri sur le bureau du président de la FAF qui a préféré, comme il le fait souvent, adopter la politique de l’autruche. En effet, l’un des membres du Bureau fédéral, Djilali Touil en l’occurrence, n’a pas attendu longtemps pour faire valoir son nouveau statut. En effet, le 23 mai 2021 à l’occasion de la rencontre MCB Oued Sly – JSM Tiaret au cours de laquelle, des joueurs tiaretis auraient été agressés avant le coup d’envoi de la rencontre, Djilali Touil s’est présenté au vestiaire des arbitres « pour les saluer » alors qu’il n’avait rien à faire à cet endroit. Le pire c’est que selon une lettre envoyée au président de la FAF par le commissaire au match, Djilali Touil aurait demandé à ce dernier de falsifier son rapport afin d’éviter la sanction à l’équipe de Oued Sly. Le commissaire au match en question a été entendu par la commission d’éthique de la FAF qui a préparé un dossier consistant et compromettant contre le membre du Bureau fédéral. Le Président a préféré zapper perdant encore des points particulièrement face à Djilali Touil qui ne rate aucune occasion pour lui rentrer dedans.
Il a dit oui au recrutement « des yeux et des oreilles » de Benhamza
Affaibli et fragilisé pour n’avoir pas pris de décisions fortes au moment opportun, Amara Charaf-Eddine acceptait tout notamment le recrutement d’un septuagénaire connu dans le milieu du football comme intermédiaire entre les clubs et les arbitres, sur demande insistante de Benhamza son vice-président. Plusieurs rapports négatifs sont arrivés au Président concernant les casseroles que traine la nouvelle recrue, mais il n’a pas voulu dire non à Benhamza pour éviter les coups bas de ce dernier, passé maître dans l’art de la déstabilisation. Aujourd’hui, Benhamza est arrivé à son but : avec cette nouvelle recrue qui passe plus de temps au parking de la FAF qu’à son bureau, il a des yeux et des oreilles sur place avec des rapports quotidiens sur tout ce qui se passe à Dely Brahim.
Il prend des instructions d’un BF bis
Dans ce climat déjà délétère, le ministère de la Jeunesse et des Sports a décrété qu’il fallait une commission mixte FAF-MJS pour débattre des problèmes du football se substituant ainsi à la Fédération dont la mission statutaire principale est justement le développement du sport-roi. Envoyant les vrais problèmes notamment celui du financement et des infrastructures aux calendes grecques, cette commission mixte présidée dans un premier temps par l’inoxydable Mohamed Mecherara, l’architecte du professionnalisme à l’algérienne qui a envoyé les clubs droit dans le mur, s’est empressé à réduire le nombre des clubs de Ligue Une de 18 à 16. Comme si le développement du football en dépendait. Mecherara a également poussé pour arrêter le championnat saison 2021/2022 avant son terme, mais le Bureau fédéral et notamment le Président de la LFP s’en sont opposés vigoureusement.
Son seul haut fait d’armes, le changement du SG
Il est de tradition qu’un nouveau président d’une association ramène avec lui ses hommes notamment aux postes stratégiques. L’ancien Secrétaire général connu pour sa loyauté envers Kheïreddine Zetchi devait être changé en raison de ses nombreuses erreurs et les centaines de rapports négatifs à son encontre envoyés au Président. Vu l’importance du poste, il fallait changer le SG soit au lendemain de l’Assemblée générale élective, soit au lendemain des rencontres amicales de juin 2021 afin de donner le temps nécessaire au nouveau SG de prendre ses marques. Mais non, Amara Charaf-Eddine a choisi de pousser son SG vers la porte de sortie une semaine avant le match Algérie – Burkina Faso décisif pour la qualification au match barrage de mars et à trois semaines du coup d’envoi de la Coupe arabe. Un très mauvais timing qui tient son explication à un crime de lèse-majesté commis par l’ancien SG qui avait refusé d’avaliser une décision unilatérale et antiréglementaire du Président concernant les dettes des clubs professionnels auprès de la CNRL.
Sa gestion du personnel est catastrophique
Avant d’enlever le SG, Amara Charaf-Eddine a tenu à renforcer la direction de la communication par l’apport de Mehdi Zentar, ancien responsable de la cellule médias du ministère de l’Industrie du temps du sieur Abdeslam Bouchouareb qui a bénéficié d’un salaire mirobolant et d’un certain nombre de privilèges jamais obtenus par les anciens responsables de la com de la FAF. Il a également recruté une responsable du digital sans aucune expérience professionnelle pour sans doute soigner son image. En quelques mois, les bourdes sur les sites et les réseaux sociaux de la FAF se comptent par dizaines, la dernière en date ce sont les félicitations du Sénégal pour sa victoire à la CAN avec une photo du Cameroun. Ces recrutements ont été effectués naturellement sans consultation aucune des membres du Bureau fédéral. Ce même BF a été pourtant unanime pour opérer un changement au sein de la direction des finances en limitant les prérogatives d’une DFC souvent absente et auteure d’un nombre incalculable de bourdes. Eh bien, le Président a choisi de quitter l’une des réunions du BF pour ne pas écouter les arguments de ses pairs et garder coûte que coûte la DFC qui a déjà bénéficié d’un certain nombre de privilèges depuis l’élection de Charaf-Eddine à la tête de la FAF.
Graves fautes professionnelles = augmentation de salaire et récompenses
En attendant de dénoncer d’autres scandales et autres dysfonctionnements dans la gestion de la FAF, nous terminons par une décision du Président de la FAF qui a laissé pantois les membres du BF ainsi que les cadres de la Fédération. Deux employées de la FAF ont commis une grave faute professionnelle et morale. Il était question de leur renvoi illico-presto sur décision du Président. Coup de théâtre ! Après avoir reçu l’une d’elles à son bureau, celle-ci a obtenu une prolongation de son contrat ainsi qu’une augmentation de salaire ! L’autre employée a été rassurée et maintenue à son poste. Du jamais vu ! Idem pour la responsable du digital au sein de la direction de la communication qui multiplie les fautes professionnelles dont la photo du Cameroun pour féliciter le Sénégal et qui a été récompensée en accompagnant la sélection féminine en Afrique du Sud.
Il ignore le DTN pendant des mois avant de le limoger
Tout récemment, Amara Charaf-Eddine a décidé de limoger le DTN et son adjoint. Passons sur la décision prise sans consultation aucune des membres du BF, mais le Président de la FAF a-t-il les capacités de valoriser le travail purement technique réalisé par Chafik Ameur et Abdelkrim Benaouda ? Bien sûr que non. Charaf-Eddine savait dès le départ qu’il allait mettre fin aux fonctions du DTN et de son adjoint, mais au lieu de le faire à son arrivée et laisser le soin au nouveau DTN de réorganiser la DTN, il a comme toujours préféré temporiser de longs mois pendant lesquels, il ne recevait pas le DTN et ne répondait même pas à ses messages. Il a lui-même désigné le DTN par intérim, le sélectionneur des U23 et le DEN sur conseils de personnes externes à la Fédération. A son arrivée, le nouveau DTN (Raymond Domenech lui a été proposé par un manager franco-algérien) trouvera des techniciens en place et devra composer avec eux, soit la charrue avant les bœufs.
Amendements des statuts zzzzzzzzzzzzzzzzzzzz !
Avant de conclure ce bilan du Président de la FAF, il fallait parler de l’amendement des statuts de la Fédération qui a fait couler beaucoup d’encre et de salive au point où Amara Charaf-Eddine le place en tête de ses priorités. Juste après son élection, il a déclaré solennellement aux membres de l’AG qu’il allait en finir avec ce problème avant le mois de juin 2021, lisez bien 2021. Huis mois plus tard, personne ne connait la date de l’AG Extraordinaire pour l’amendement des statuts. Ces statuts ont été pourtant avalisés par les juristes du MJS, mais certains nouveaux membres du BF ont choisi de les tripoter encore et encore, histoire d’élargir leurs prérogatives et rester le plus longtemps possible en poste.
Nabil Boughanem, La Gazette du Fennec
