Il y a des silences qui en disent long, et celui de Khaled Ben Yahia, entraîneur du MC Alger, commence à faire du bruit. Depuis plusieurs journées, le technicien tunisien brille par son absence aux conférences de presse d’après-match, déléguant systématiquement la tâche à son adjoint, Othmen Najjar. Une attitude qui, loin d’être anodine, viole ouvertement l’article 32.5 du règlement de la Ligue Professionnelle de Football (LFP), lequel stipule sans ambiguïté que « l’entraîneur a pour obligation de participer à la conférence de presse de fin de match » et que « le non-respect de cette disposition est sanctionné conformément au code disciplinaire en vigueur ». Alors, que se passe-t-il dans la tête de Ben Yahia ? Et pourquoi la LFP reste-t-elle muette face à ce qui s’apparente à un véritable camouflet ?
Le dernier épisode en date a mis le feu aux poudres. Lors de la conférence de presse, samedi 15 mars 2025 après le match face à l‘Union sportive madinet Khenchela (2-2), un journaliste a osé demander à Othmen Najjar des explications sur l’absence répétée de son patron. La réponse de l’adjoint a été aussi lunaire qu’explosive : “Tu ne représentes pas la presse, tu ne représentes que toi-même”, a-t-il lâché.
Disponible quand il le veut !
Othmen Najjar ajoute, dans une pirouette sidérante :“L’entraîneur a des tâches à accomplir. Quand il sera disponible, il viendra. Quand je suis disponible, je le fais.” Sérieusement ? Depuis quand la conférence de presse, obligation réglementaire s’il en est, devient-elle une option facultative, un passe-temps que l’on case entre deux “tâches” jugées plus nobles ?
Cette déclaration, d’un mépris confondant, a laissé les journalistes présents abasourdis. Car au-delà de l’arrogance, elle révèle une conception bien singulière du rôle d’un entraîneur de haut niveau. Ben Yahia et son staff semblent oublier une chose essentielle : la presse, aussi imparfaite soit-elle, est un maillon clé du football moderne. Elle est le relais entre le terrain et les supporters, ceux-là mêmes qui font vivre le MCA par leur passion indéfectible. Les snober, c’est snober le peuple vert et rouge.
LFP, où es-tu ?
Mais le plus consternant dans cette affaire, c’est le silence assourdissant de la Ligue Professionnelle de Football. L’article 32.5 est clair comme de l’eau de roche, l’absence de l’entraîneur est une infraction passible de sanctions. Pourtant, pas un mot, pas un rappel à l’ordre, pas la moindre réaction ? À quoi sert un règlement si ceux qui sont censés le faire respecter détournent le regard ? Cette inertie est une insulte non seulement aux journalistes, mais aussi à l’intégrité du football algérien. Si la LFP laisse passer ça, que restera-t-il de son autorité demain, quand des dérives plus graves surviendront ?
Khaled Ben Yahia, lui, n’en est pas à son premier coup d’éclat. Réputé pour son caractère bien trempé, l’ancienne gloire de l’Espérance de Tunis a souvent cultivé une image d’homme au-dessus des contingences. Mais ce qui pouvait passer pour du charisme en Tunisie prend ici des airs de suffisance. À Alger, au sein d’un club aussi prestigieux et exigeant que le MC Alger, on n’échappe pas à ses responsabilités sous prétexte de “tâches à accomplir”. Les supporters du Mouloudia méritent mieux qu’un entraîneur qui joue les fantômes quand il s’agit de rendre des comptes.
Un manque de respect qui doit cesser
Car c’est bien de respect qu’il s’agit. Respect pour les journalistes, qui, quoi qu’en dise Najjar, ne sont pas là pour faire de la figuration. Respect pour les règles, qui ne peuvent être foulées aux pieds sans conséquence. Respect, enfin, pour une institution comme le MCA, qui ne devrait pas tolérer que son image soit ternie par de telles polémiques.
Il est temps que le technicien tunisien descende de son piédestal et assume pleinement son rôle. La conférence de presse n’est pas une corvée, mais un devoir. Khaled Ben Yahia a rendez-vous avec l’histoire. Mais pour l’instant, il semble surtout avoir rendez-vous avec ses obligations… qu’il continue d’ignorer. Jusqu’à quand ? En tout cas le Mouloudia ne mérite pas cette polémique.